Se déprendre de l’idée que je me fais de l’animal. L’idée fait de la forme son but. Elle l’a met en cage.

Ces sculptures désirent se libérer. J’essaye, du mieux que je peux, de créer de bonnes conditions de libérations.

Découvrir dans la pierre une manière qu’a l’animal d’apparaître – lui et moi étonnés! – et dans sa fragilité, s’éternise, sa possibilité de disparaître…

Zibeline (ou Renard)

« Les zibelines sont des brouilleuses de sens (…) Elles sautent depuis les arbres dans la neige, courent en cercle et en spirale, parfois en zigzag, reviennent sur leurs pas dans leurs propres traces puis sautent de nouveau dans les arbres. C’est comme ça qu’elles perdent leurs poursuivants. N’essaie même pas de trouver où elles habitent en suivant leurs signes dans la neige, c’est peine perdue. Tu n’as qu’a regarder les chiens, ça les rend fous, ils se mettent à courir de manière completement désordonnée en essayant de savoir où elles sont passées. Alors voilà. Nous aussi, on sème le doute et on brouille les pistes en effaçant nos traces… » (dans « À  l’est des rêves », Nastassja Martin, p.132)

« Les mythes fondateurs sont comme les animaux géants réputés vivre sur terre bien avant les humains : ils laissent des traces; le paysage en est empreint. Pourtant Zibeline, n’est pas un être mythique, et n’est même pas ici ressaisie dans une histoire a dormir debout (…) Elle est simplement elle-même, et nous essayons de l’attraper. Cest à ce « simplement elle-même » qu’il faut revenir (…) Zibeline est puissante, en ce sens qu’elle produit de l’intelligence rusée chez ses prédateurs, qui ne veulent pas devenir fous en se perdant sur ses traces, c’est-à-dire dévier de leurs trajectoires et faire des choses auxquelles ils ne s’attendaient pas. Si Zibeline produit de la pensée chez ses poursuivants, c’est parce qu’elle possède l’intelligence rusée en partage avec eux : en étant « simplement elle-même », elle les enjoint à « penser plus loin ». Zibeline est un trickster au sens plein du terme: elle incarne réellement tout ce qu’on ne contrôle pas, tout ce qui résiste et pourtant nous attire, tout ce dont on voudrait se saisir mais qui se refuse, et oblige ce faisant les humains à penser au coup d’après. (…) Zibeline possède une puissance magique restreinte, l’obligeant à se mettre à l’épreuve d’une volonté autre que la sienne, et donc à ruser constamment pour rester en vie. Elle est un étre Métamorphique, parce qu’elle met la ruse au service de tout ce qui peut la rendre invisible, et donc insaisissable ». ( « À l’est des rêves », Nastassja Martin, p.133-134)